Underground Resistance

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Lorsqu’on évoque Underground Resistance, on parle d’un collectif mythique, pour plusieurs raisons. D’abord pour sa participation à la définition du son Techno, ce genre musical qui a émergé à la fin des années 80, à Detroit. Originaires de la Motor City, les membres d’Underground Resistance font partie de la seconde vague d’artistes Techno de Detroit, après le trio d’initiateurs Juan Atkins, Derrick May et Kevin Saunderson. Mythique, le collectif fondé en 1990 l’est aussi par sa radicalité, son esthétique sans compromis. Sur les pochettes des disques n’apparaît que le logo UR reconnaissable entre tous, les visages des membres restent cachés sous des cagoules en concert.

Cet anonymat, couplé à un refus d’apparaître dans les médias, vient d’une volonté affichée de mettre la musique en avant, qu’elle seule importe plutôt que ses interprètes. Le producteur s’efface derrière sa musique, les artistes restent anonymes pour éviter de tomber dans la stratification, qui nuit au sens profond de la musique. L’utilisation de pseudonymes pour brouiller les pistes est courante. Leur musique est aussi le seul média au travers duquel ils peuvent s’exprimer sans que leur pensée soit déformée, qui peut toucher directement leurs auditeur.ices.

À travers le mouvement Techno, Underground Resistance s’inscrit dans un courant musical innovant, directement inspiré des conditions sociales difficiles des afro-américains de Détroit, cette ville industrielle qui connaît le chômage de masse, la pauvreté, les violences policières, le racisme. S’inspirant de l’imaginaire militaire et de la fierté d’être noir-e de Public Enemy, UR rompt avec l’industrie musicale, montant ses propres labels, studios, et réseaux de distribution, pour être en totale indépendance et garder le contrôle sur leur musique et leur image.

Joan Baez

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Joan Baez est une autrice-compositrice et interprète américaine, née en 1940 et associée au courant musical Folk. Elle a joué lors d’événements majeurs comme la première édition du Festival folk de Newport en 1959, ou encore le fameux festival de Woodstock. Engagée activement, elle soutient les marches pour les droits civiques, se bat contre les injustices sociales, et contre la guerre du Viêt Nam.

Avec une carrière longue de plus de 60 ans et plus de 30 disques à son actif, on pourrait penser que son engagement faiblirait, mais il n’en est rien. À 80 ans passés, Joan Baez continue de suivre et de commenter l’actualité politique. Dans sa jeunesse, “la reine du Folk” découvre en concert Pete Seeger, pionnier du Folk et ami de Woody Guthrie (que nous avons déjà présenté). Elle comprend que la musique est politique, et qu’elle se doit d’interpréter et d’écrire des chansons sociales, aux paroles qui reflètent une vision du monde et ne sont pas de simples instruments de divertissement.

Joan Baez au rassemblement contre la guerre du Vietnam. Londres, 1965

Elle est aussi transformée par les discours de Martin Luther King, qui exercent sur elle une influence décisive. Dans l’Amérique ségrégationniste des années 60, le combat de King porte un espoir de paix et de rassemblement, dans lequel la jeune Joan se retrouve complètement. Un combat pacifiste qu’elle prolongera quelques années plus tard, en partant au Vietnam, alors bombardé par les avions américains. Autre anecdote marquante, en 1981, elle doit donner une tournée de concerts à travers l’Amérique du Sud. Mais le Chili et l’Argentine traversent une période trouble, avec les dictatures de Pinochet et Videla. Elle se rend sur place mais, menacée de mort, elle doit se résoudre à ne pas monter sur scène devant le danger.

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Princess Nokia

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Princess Nokia, c’est l’alias finalement adopté par Destiny Nicole Frasqueri après autres: Wavy Spice et Destiny. Rappeuse Américaine d’origine Portoricaine, née en 1992, date éponyme de sa plus célèbre mixtape, elle enregistre sa première chanson, Destiny, en 2010. Profondément influencée par New York et ses quartiers, tels que le Bronx ou Harlem, elle s’est notamment essayée au Blues et à la Soul en tant que Destiny sur son projet Honeysuckle, projet engagé où elle affirme sa position face à la recrudescence des violences raciales aux États-Unis.

Après avoir fréquenté le milieu des rave-parties, elle finit par organiser ses propres soirées et travaille en parallèle en tant que gogo-danceuse. Plus tard encore, elle fonde avec Milah Libin le Smart Girl Club, un collectif queer et féministe à travers duquel elle diffuse des émissions de radio hebdomadaires, ainsi que des clips. S’identifiant en tant que personne bisexuelle et non-binaire, elle a donné plusieurs concerts dans des clubs gay à ses débuts, ancrant le début de sa réputation à la scène LGBT+.

Pochette de l’album 1992 sorti en 2016 ( auto-production) et réedité en 2017 par Rough Trade

Artiste indépendante qui le clame haut et fort, ses albums sont autoproduits et elle a plusieurs fois refusé les propositions de maisons de disques. Néanmoins, cela ne l’empêche pas de participer à de grandes campagnes de publicité pour des marques de luxe, telles que Margiela, pour laquelle elle a été ambassadrice, ou encore Calvin Klein.

Son succès l’a également amené à donner des concerts dans des universités, comme Harvard ou Cambridge, concerts que l’on pourrait critiquer, mais à titre d’anecdote, elle serait descendue de scène pour gifler un homme ayant proféré des obscénités à Cambridge, ce qui, somme toute, collerait plutôt bien au personnage.

Texte: Kévin Juskiwieski

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DJ SPRINKLES

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Terre Thaemlitz est une artiste américaine vivant au Japon depuis plusieurs années. Inclassable, et c’est bien là tout son charme. Après de nombreuses sorties remarquées teintées Deep House sous son alias DJ Sprinkles, elle a aussi sorti sous le nom de Terre Thaemlitz des projets plus confidentiels et expérimentaux entre Ambient et Computer Music.

Elle soulève la question de la reconnaissance et l’acceptation des identités transgenres au sein de la société. Des problématiques bien trop rarement abordées et jamais avec autant de passion et d’engagement que Terre. C’est lors de conférences et performances qu’elle étaye son propos sous couvert d’un certain pessimisme mélangé avec une pointe de cynisme qui lui est propre et qui fait tout son charme.

https://comatonse.bandcamp.com/album/love-for-sale-taking-stock-in-our-pride

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Drexciya

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Duo légendaire issu de la ville de Détroit, actif de 1992 jusqu’à la mort de l’un de ses membres en 2002, Drexciya a contribué à définir le son de la Techno de Detroit ainsi que de l’Electro. Leurs productions vont sortir sur des labels majeurs de la musique électronique mondialisée, tels que chez les allemands de Tresor, les anglais de Warp, ou le label issu de Detroit le plus militant de la scène Techno (dont nous reparlerons), Underground Resitance.

Refusant totalement la logique de starification des musiciens, les deux membres du duo entretiendront le plus longtemps possible des doutes sur leur véritable identité, préférant rester dans l’anonymat. Rester anonyme pousse à s’intéresser directement à leur musique, sans idolâtrer les individus qui la produise.

Pochette de l’EP Aquatic Invation, 1995 (Underground Resistance)

À travers les titres de leurs morceaux, ainsi que les notes et illustrations qui accompagnent leurs albums, Drexciya développe un univers fantastique dans lequel les enfants des femmes africaines, jetés dans l’océan en raison de leur grossesse lors de la traversée de l’Atlantique, ont survécus et peuplent désormais un monde sous-marin. On peut y voir une référence directe à l’esclavagisme et au commerce triangulaire.

Drexciya se rattache à l’afrofuturisme, mouvement artistique majeur, dans lequel la musique joue une place primordiale, notamment celle de pionniers comme Sun Ra ou George Clinton. Ce mouvement place l’art noir au centre de tout, et offre comme réponse aux oppressions subies par le peuple noir l’imagination, la créativité ou l’improvisation. Un pont est fait entre toutes les musiques noire, du Jazz au Blues en passant par le Funk, jusqu’au Reggae, au Hip-Hop et à la Techno.

Recommandations d’écoute:

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Public Enemy

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Public Enemy – les débuts de la politisation du Hip-Hop

Public Enemy est un groupe New-yorkais, pionnier du Hip-Hop, actif depuis 1982. Le groupe rencontre un succès planétaire à la fin des années 80, avec des albums marquants comme It Takes a Nation of Millions to Hold Us Back en 1988, ou Fear of a Black Planet en 1990, acclamés par le public, mais qui suscitent la controverse ainsi qu’un rejet de la part de la classe politique.
À ses débuts dans les années 70 puis dans la première moitié des années 80, le Hip-Hop sert de divertissement aux jeunes des ghettos de New York, notamment à travers les battles de danse, de rap, le Graff et les soirées festives. Il n’a pas encore la dimension engagée qu’on peut lui connaître. Public Enemy va fortement participer à cette politisation du Hip-Hop.

Fasciné par le combat des Black Panthers et les discours de Malcom X, le leader du groupe, Chuck D, va chercher par tous les moyens à diffuser ces idées. En réfléchissant à l’impact du rap, notamment sur les jeunes, il critique les rappeurs à succès de l’époque, LL Cool J en tête, pour la futilité de leurs textes.

Proches de la très controversée Nation of Islam, le groupe milite pour un suprémacisme noir, en réaction au racisme de la société américaine. À travers ses textes, le groupe évoque des sujets tels que les bavures policières, l’infamie du système carcéral, la partialité des médias au service de l’élite blanche, ou les ravages de la drogue dans les quartiers.